L’édito n°4 : diffusion infernale


6 épisodes pour démarrer la saison 1 de Justified sur Série Club ! Insensé !

Cher amis, tout fout le camp ! Rassurez-vous, je ne vais pas vous ennuyer avec la fermeture de MegaUpload (inutile de faire les présentations je présume…) jeudi dernier, encore que le sujet que j’ai décidé d’aborder dans ce quatrième édito peut être facilement relié avec cet événement tragique pour moult internautes qu’a constitué la perte de ce fournisseur (illégal) de contenus protégés.

Aujourd’hui, pas de coup de coeur pour Emily Thorne ni de joie post-Golden Globes, mais un coup de gueule façon “j’enfonce des portes ouvertes, mais je m’en fiche, car ça m’énerve trop et il faut que j’en dise deux-trois mots même si ça ne fera pas avancer le schmilblick pour autant.” Car, dans ce “papier”, j’ai décidé d’évoquer la (mauvaise) diffusion des séries (US) sur les chaînes françaises.

Vous vous dites fan de séries parce que vous ne manquez aucun épisode des blockbusters de l’audience du PAF, du type Dr House, The Mentalist, Grey’s Anatomy, Castle, Desperate Housewives, etc., bref les lauréats habituels du Grand Prix des séries et autres votes du public du même genre ? Vous pouvez dormir (assez tôt) sur vos deux oreilles car contrairement à ce que vous pensez, vous n’êtes pas fan de séries, mais juste client des séries grand public et celles-ci sont programmées régulièrement et en première partie de soirée. A part la diffusion de certains polars dans le désordre, il n’y pas grand chose à redire.

Vous êtes un « vrai fan de séries télé » ? Celui qui ne se contente pas de se “vider la tête” devant un NCIS mais apprécie aussi des séries de tout genre (le sériephile (*) a forcément des goûts éclectiques en la matière), de la série judiciaire “grand public haut de gamme” comme The Good Wife à l’exigeant period drama Boardwalk Empire en passant par des sitcoms -un genre maltaité chez nous- et de l’espionnage à la Nikita ? Si, c’est le cas et que, par ailleurs, victime de la peur du gendarme, vous venez de prendre la décision/résolution de ne pas (plus) enfreindre la loi, bonjour l’angoisse !

Soyons concrets deux secondes. Dans le cas de The Good Wife, M6 vous fera une petite fleur : un passage en prime (yeah !), mais avec une diffusion corsée constitué de 4 épisodes à la suite. Problèmes : obligation de rester devant votre petit écran de 20h50 à minuit environ avec risque possible de lassitude, d’endormissement prématuré, etc. Recourir à l’enregistrement ou le replay est une (fausse) bonne solution : vous êtes sériephile, vous regardez plus ou moins une quinzaine d’épisodes par semaine, votre planning est plein comme un oeuf (surtout si vous essayez d’entretenir un minimum de vie sociale, enfin, de vie sans écran surtout), si vous n’êtes pas du genre organisé(e), vous êtes fichu(e).

Pas de fidélisation mais du remplissage

Vous ne voulez pas manquer un épisode de How I Met Your Mother ? Bonne nouvelle, la sitcom est proposée sur pas moins de trois chaînes différentes : NT1, MTV et TF6. Mauvaise(s) nouvelle(s) : il faudra oublier la VO et faire une croix sur les saisons les plus récentes. Déjà là, c’est mal barré ! Mais que dire du rythme de diffusion : en journée, 5 épisodes d’affilée sur MTV, 6 sur NT1 et 11 sur TF6 ! Et pas toujours dans l’ordre ! Tout est réuni pour ne pas regarder sauf à l’occasion comme quand on tourne le bouton sur une chaîne musicale pour se faire quelques clips…

Autrefois limitée à 2 ou 3 épisodes afin de coller au format cinéma/téléfilm de 1h30-2h des primes français, la “diffusion par lot de plusieurs épisodes” est devenue une norme de programmation, y compris en journée, et gagne en volume au fil des ans. Il ne s’agit plus tellement de donner envie au téléspectateur de revenir la semaine suivante, de le fidéliser (une caractérisque pourtant inscrite dans l’ADN du format série), mais de l’empêcher de zapper ou d’éteindre son poste de télé. Il est loin le temps où l’on pouvait savourer une saison de Buffy contre les vampires pendant six mois à raison d’un épisode par semaine !

Non seulement, cette façon de faire a envahi toutes les chaînes, gratuites ou payantes (cela reste tout de même assez limité sur des chaînes premium comme Canal Plus) mais semble prendre une tournure qui dépasse le raisonnable à l’instar de Série Club qui débutera la 1ère saison de la très estimée Justified le 5 février avec les 6 premiers épisodes -soit la moitié de la saison- de 20h45 à 01h15 du matin ! No comment !

On a beau dire que les séries sont devenues légitimes en France, elles ne servent malheureusement principalement qu’à faire du remplissage de grilles, aussi bien sur la TNT que sur le câble. Prenons encore quelques exemples avec ce samedi 21 janvier : 4 épisodes de Glee sur W9, 5 épisodes de Ugly Betty et 5 épisodes de X-Files sur NRJ 12, 5 épisodes de Smallville et 5 épisodes de Gossip Girl sur TF6, 6 épisodes de White Collar, 4 épisodes de Eureka et 4 épisodes de Southland (6 épisodes ce dimanche) sur Série Club.

Avec une telle programmation, il est quasi-impossible de suivre une série dans la continuité. On peut juste picorer un épisode ici-ou-là, pour “passer le temps” comme on dit, ou plus cyniquement, s’en servir pour ajouter un petit fond sonore à notre séance de repassage ou de sudoku.

Les séries tv, loisir de luxe ?

En soirée, ce rythme infernal se conjugue avec des horaires de « dingue”. C’est le cas pour la malheureuse Nikita dont TF1, sous prétexte que 24h Chrono diffusée à sa suite la nuit ne trouve pas son public (sic !), a décidé de lui ajouter un épisode si bien qu’il faudra désormais veiller jusque 1h30 du matin pour suivre le lot de trois dans son intégralité. No comment !

Pour échapper à cet inconfort généralisé, il n’y pas de secret, il faut mettre la main au portefeuille : s’abonner à Canal Plus et/ou à Orange Cinéma Séries, acheter les DVD ou se tourner vers la VOD payante (avec les épisodes disponibles le lendemain de leur diffusion aux Etats-Unis). Les chaînes premium précitées font de gros efforts pour proposer rapidement les séries quelques mois -voire même quelques semaines- après la diffusion américaine mais tout le monde n’a pas les moyens d’investir dans des abonnements aussi coûteux (qui plus est, pour une offre limitée).

Dans le cas des DVD, vous êtes maître de votre programmation et vous avez accès à la VO, c’est génial. Sauf qu’il patienter parfois presque deux ans après la diffusion américaine pour découvrir les nouveaux épisodes, c’est l’inconvénient du support et de la chronologie des médias (ex: The Good Wife saison 2, qui a débuté en septembre 2010 sur CBS, sort en février 2012). La patience, non seulement, ce n’est pas gratuit, mais c’est aussi malheureusement le risque de se faire spoiler sur Internet (parce que le sériephile est un gros consommateur de sites web qui parlent de séries et aime discuter séries avec d’autres sériephiles).

Sur le papier, la VOD représente la solution idéale à ces désagréments de programmation. Télécharger en toute légalité des épisodes diffusés la veille chez l’Oncle Sam, c’est possible à l’heure actuelle, mais si l’on multiplie les titres, l’addition sera forcément salée à la fin du mois. iTunes propose ainsi la première saison d’Alcatraz en achat mais il faudra débourser 32.99 € pour pouvoir visionner l’ensemble des 13 épisodes. De son côté, MyTF1VOD permet de suivre la première saison de Person of Interest, une autre nouveauté de cette saison US, mais là encore, à raison de 1.99 € l’épisode (avec un visionnage limité dans le temps qui plus est), il vaut mieux avoir de la réserve.

Au final, on se rend compte qu’être sériephile et aux ressources financières limitées sans se tourner vers l’illégalité tient presque de l’exploit quand on se retrouve confronté à autant d’obstacles. Cinéphile, vous avez la possibilité de prendre une carte de fidélité et aller voir autant de films qu’il vous plaira en salle. Super ! Musicophile, vous pouvez écouter pratiquement n’importe quel morceau sur un service de streaming légal comme Spotify. Génial ! Vous êtes sériephile ? Dommage…

Nick

(*) “sériephile”, “fan de séries”, ok, mais pas “accro aux séries”, une expression que je n’apprécie guère qui sous-entend une pathologie et dont le remède ne serait pas la création d’une sorte de « Spotify séries » mais simplement d’en regarder moins.

Visuel : Justifed/FX.

10 réponses

  1. Buffy etait dans la case de la trilogie du samedi, avec 3 episodes, non? 🙂

    Je crois savoir que certains episodes trop choquants ne sont pas diffusés en prime. D’où un certain desordre dans l’ordre de diffusion.

    Les horaires tardifs m’arrangent plutot. Mais trop d’episodes a la suite, c’est abusé, c’est clair. De quoi devenir seriephobe!

    • Vers la fin, c’est fort probable, mais sinon, il y a bien eu une bonne période avec trois séries différentes et un seul épisode de Buffy par semaine.

  2. Merci pour ce bilan déprimant et réaliste 😦
    Et surtout ne pas hésiter a en reparler ici, si la situation s’améliorait.
    Pour ma part je ne prend même plus la peine de regarder ce que font les chaînes françaises (a part Nolife) ou les sites de VOD et j’en suis le premier navré.
    J’avais bien en projet de suivre Borgen sur Arte, dont j’ai appris la diffusion ici. Mais la plus que probable diffusion en VF m’en dissuadera probablement :-/

  3. Très bon résumé de la situation. C’est pas une nouveauté que les séries sont considérées comme un sous-genre en France. J’ai entendu je sais plus où que tant que les droits n’avaient pas été achetés en France, techniquement on était pas dans l’illégalité si on regardait via une source illégale mais je suis pas du tout certaine.
    En revanche, je suis certaine que HIMYM est disponible en VO sur au moins une des trois chaines parce qu’il m’arrive de regarder quand je tombe dessus.

    Finalement, j’ai trouvé mon compromis : je regarde illégalement les épisodes le lendemain de leur sortie puis j’achète le DVD quand il sort si j’ai aimé.

    Le truc que tu n’as pas traité et dont on parle moins c’est la censure des épisodes. Sans aller jusqu’à l’extrême comme Angel autrefois, il y a encore souvent des scènes coupées (ou mal doublées, mais ya déjà eu un podcast là-dessus cette semaine).

    • C’est sûr qu’on peut encore creuser davantage, avec la censure, le doublage, la disponibilité aléatoire de la VM, etc. Mais le « minimum syndical », c’est une bonne diffusion. 🙂

  4. C’est là un bien triste constat. Et ce n’est pas prêt de s’arranger. Le plus triste est de voir que les chaînes de la TNT ne proposent aucune vraie alternative en matière de séries.

  5. Que rajouter de plus?? Si tant est que les sources « alternatives » se tarissent (ce dont je ne suis pas persuadé), on a effectivement une VOD à un prix peu attractif et un coffret DVD qui arrivera en france un à deux ans plus tard (au mieux).. Quand au diffusions française, c’est très souvent une catastrophe comme tu le dis, avec en plus parfois des épisodes qui ne sont pas diffusés dans l’ordre chronologique (et j’aimerais bien savoir pourquoi..), à la chaine,.. Bref, dans l’irrespect le plus total des fans.
    Dans ce contexte, ce n’est pas la peine de se demander pourquoi megaupload avait autant de succès…
    Belle analyse en tout cas..

  6. Evidemment, d’accord à 200%.
    Les sériephiles en France sont ignorés complètement. Alors que nous devrions précisément être les téléspectateurs à dorloter étant donné la fidélité à un programme et la bonne volonté de débourser un petit peu (mais pas trop!) que nous avons. La programmation française est l’une des premières raisons du piratage de série en France. Alors qu’il y a largement la place pour déprogrammer les merdes télévisuelles à la Secret Story et consort.

    On est comme du bétail à qui on met une montagne de foin à becter. Le problème c’est qu’il y a à becter pour l’année et qu’on nous l’enlève et le jette au bout d’un mois. Quel gâchis !

Poster un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.